Au WordCamp US à Philadelphie le week-end dernier, je présentais le cas du projet Les animaux ne sont pas des choses pour montrer que l’influence ne devait pas servir qu’à accumuler des likes et qu’on devrait plutôt chercher à rendre le monde meilleur. La vidéo où je raconte tout ça avec mon gros accent pendant que j’essaie de couper mon texte trop long est ici:

Vous passez à côté d’une auto verrouillée. Il y a un chien à l’intérieur. Il fait chaud. Qu’est-ce que vous faites ? Pour la plupart d’entre nous, la réponse serait simple. On briserait la fenêtre de la voiture, on appellerait de l’aide, on donnerait de l’eau à la pauvre bête. Mais si c’était un cochon qui était en train de suffoquer ?

La première fois que j’ai vu La Politique sexuelle de la viande de Carol J. Adams, je parcourais les rayons d’une librairie de livres d’occasion. La couverture mauve détonnait parmi les classiques de la question animale. Je l’ai pris pour le reposer aussitôt: n’y avait-il pas plus urgent et plus important à lire que les élucubrations d’une féministe ?

Ce texte est paru dans le journal L’Itinéraire du 15 janvier 2016.

Le 4 décembre dernier, l’Assemblée nationale adoptait à l’unanimité le projet de loi 54 qui modifie le statut juridique de l’animal. Les élus se sont levés pour dire que « Les animaux ne sont pas des biens. Ils sont des êtres doués de sensibilité et ils ont des impératifs biologiques. »

Lorsque Sophie Gaillard, Martin Gibert et moi-même avons lancé le manifeste Les animaux ne sont pas des choses il y a à peine deux ans, nous étions loin de nous imaginer qu’il susciterait un quelconque intérêt en dehors de nos cercles d’amis et des réseaux animalistes.

Conférence et discussion

Avec Christiane Bailey, étudiante au Doctorat en philosophie, Université de Montréal
et Élise Desaulniers, auteure.

Le samedi 7 février, de 10h à 12h15, UQAM (A-2405, pavillon Hubert-Aquin).
Dans le cadre de Philopolis. Entrée libre.

Le mouvement pour la protection des animaux est largement composé de femmes, mais les liens entre féminisme et libération animale ainsi qu’entre patriarcat et suprématie humaine sont encore méconnus.

(CRITIQUE DU NÉOCARNISME ORDINAIRE)

Les élevages à petite échelle et soucieux du bien-être animal sont-ils moralement acceptables? Dans son dernier livre, l’universitaire américain James McWilliams propose une histoire du temps présent et nous raconte un fait divers survenu au Vermont en 2012. Bill et Lou, les deux bœufs de trait – et les deux mascottes – d’une petite université pour environnementalistes adeptes de la « sustainability », allaient être servi à la cafet’. D’aucuns s’en soucièrent. Avec cette chronique d’une controverse agricole et cette critique du néocarnisme ordinaire,  McWilliams nous offre une plongée stimulante en éthique appliquée. Et un livre important.

Je serai avec Martin Gibert à Clermont-Ferrand lundi le 8 juillet pour animer une conférence-débat organisée par La Griffe. Je vous copie le communiqué :

Élise Desaulniers et Martin Gibert vivent à Montréal. La première est auteure de deux essais sur les questions éthiques liées à l’alimentation et elle est fréquemment invitée par les médias de son pays à commenter les questions relatives à l’éthique animales qui connaissent, outre-Atlantique, un intérêt grandissant.

« Mais pourquoi devrait-on se soucier des bêtes qui ne se soucient pas de nous? Croyez-vous qu’un requin affamé ferait la différence entre un méchant carnivore et un gentil végétarien ? Moi, je crois bien qu’il n’hésiterait pas à nous manger… « . C’est vrai. Alors pourquoi devrait-on se soucier des animaux alors qu’eux ne se soucient pas de nous?

Vivre et laisser vivre. Je vous laisse manger votre tofu, fichez-moi la paix avec mon poulet. Est-ce que les carnivores se sont énervés quand McDo à commencé à vendre de la salade ? Alors pourquoi ne pourrait-on pas vendre du poulet chez Commensal ? Chacun ses croyances ! Chacun a droit à ses idées et à manger ce qu’il veut ! Faites dont preuve d’un peu de tolérance !

 

J’écris beaucoup moins ces temps-ci mais ce n’est pas que j’ai arrêté de me questionner sur les conséquences de nos choix alimentaires. Au contraire. D’ailleurs, commence ce mercredi à offrir mon premier « vrai » cours à vie dans le cadre de l’UPop, l’Université populaire de Montréal. Ce cours, « L’éthique dans l’assiette » est offerts sur cinq semaine, le mercredi soir à 19h, du 26 septembre au 24 octobre. Les rencontres auront au Bar Populaire dans la petite Italie (6584 St-Laurent). Et le plus génial dans tout ça, c’est gratuit et qu’il n’y a pas d’inscription nécessaire (en revanche, on peut boire de la bière en m’écoutant). À chaque séance, une heure de théorie, une heure de questions.

Je vous en parlais il y a quelques semaines, le New York Times a demandé à ses lecteurs de dire en quelques centaines de mots pourquoi il est éthique de manger de la viande ».

Un jury composé de Peter Singer, Michael Pollan, Jonathan Safran Foer, Mark Bittman et Andrew Light a sélectionné six textes. Les lecteurs ont choisi celui d’Ingrid Newkirk, une des fondatrice de PETA (People for the Ethical Treatment of Animals) qui défendait l’idée selon laquelle seule la viande in vitro pouvait être consommée éthiquement (les textes étaient jugés anonymement). Quant au texte sélectionné par le jury, il n’aura séduit que 14% des lecteurs. Son auteur, Jay Boost, est agro-écologiste et enseigne dans un collège de Caroline du Nord.

Le New York Times organisait le mois dernier un concours dans lequel on invitait les lecteurs à soumettre de courts textes qui donnait des raisons éthiques de consommer de la viande. Initiative des plus intéressantes : au lieu de demander aux végés de justifier leurs positions, on déplace le fardeau de la preuve chez les carnivores.

Le jury composé de Peter Singer, Michael Pollan, Jonathan Safran Foer, Mark Bittman et Andrew Light a choisi six textes finalistes. On invite maintenant les lecteurs à voter pour leurs textes préférés avant le 24 avril.

Les programmes de soutien de l’État à l’agriculture au Québec

Pour son premier article dans la section « opinion » du New York Times en début e semaine, Mark Bittman proposait son « Food Manifesto for the Future » et élaborait une dizaine d’idées pour prendre la culture, la préparation et la consommation de nourriture moins dommageables, plus productives, plus durables et plus saines. Ses deux premières idées touchaient les subventions versées par l’État. Mettre fin aux subventions à la nourriture transformée et commencer à subventionner ceux qui produisent et offrent de la vraie nourriture directement aux consommateurs.

Les arguments incarnés de Jonathan Safran Foer.

 

Je viens de terminer le dernier livre de Jonathan Safran Foer Faut-il manger des animaux? (Éditions de l’Olivier). Élise, qui en a déjà parlé dans sa version originale (Eating Animals) m’a demandé d’en dire quelques mots pour saluer la traduction française. Si j’ai accepté avec enthousiasme, c’est parce que je crois qu’il est hautement recommandable. C’est vraiment le genre de livre que j’ai envie d’offrir à mes amis.

Entrevue avec Emmanuelle Grundmann

La population augmente, les forêts sont détruites, des espèces disparaissent, l’érosion de la diversité génétique s’accélère.

Pour la primatologue française Emmanuelle Grundmann en entrevue dans Le Devoir ce matin, l’homme pourrait à son tour disparaître d’ici 2100 s’il ne remet pas profondément en question sa suprématie au centre de la nature. L’annonce est provocatrice, mais a le mérite de nous rappeler l’urgence d’agir. L’auteure remarque que « l’érosion de la biodiversité est perceptible dans les campagnes, loin des villes, dans les pays du tiers monde, loin de nous, ou dans les océans, en dessous du niveau de la mer » alors que l’homme continue de se sentir au-dessus de la nature et perd le sens de la complexité de l’écosystème dont il dépend pour survivre. Pour nos sociétés en rupture avec la nature, les atteintes à la biodiversité sont effectivement présentées comme des anecdotes et rien ne nous pousse à aller plus loin.

Penser avant d’ouvrir la bouche a un an aujourd’hui.

Enfin, techniquement, c’est demain. Mais tout à commencé le dimanche matin du changement d’heure l’an dernier. J’avais alors décidé de profiter de mes minutes en bonus pour m’ouvrir un compte WordPress et poster mon premier billet, sur l’idée de Peter Singer d’instaurer une taxe sur la viande.

Solutions locales pour un désordre global

Présenté il y a quelques jours au FNC, Solutions locales pour un désordre global, prendra l’affiche au cinéma Parallèle de Montréal le 5 novembre. Le nouveau documentaire de Coline Serreau fait état d’initiatives d’agriculture alternative de partout autour du monde en nous présentant les témoignages d’agriculteurs, de militants et de penseurs qui luttent chacun à leur façon contre l’emprise des semenciers. Ils se nomment Pierre Rabhi, agriculteur écolo bien connu en France, Devinder Sharma, agronome indien ou Joao Pedro Stedile, activiste des paysans sans terre brésilien. Serreau fait le pari que ces idées et points de vue seront reçus comme autant de voies pour construire une agriculture plus saine.

Les problèmes du saumon d’élevage

Tartare de saumon, canapés de saumon fumé, sashimi de saumon, darnes de saumon fourrées au chèvre. Rares sont les semaines où les participants à Un souper presque parfait n’ont pas droit à deux ou trois portions de saumon. Le saumon semble avoir remplacé le poulet comme l’aliment passe-partout que tout le monde aime, avec l’avantage d’être à la fois santé, un peu chic et aussi riche en goût qu’en oméga3. Pas étonnant qu’on mise sur lui pour rapporter 2000$. Mais ce qui est aussi fascinant avec le saumon, c’est que c’est le poisson le plus cultivé en captivité. L’essentiel des saumons consommés proviennent de l’aquaculture et les cultures de saumons semblent reproduire dans l’eau tous les problèmes des élevages industriels sur terre.

« Quel est le principal problème des végétariens? Les protéines? Les restaurants? Les carences? Non. Le principal problème, c’est le cri de la carotte. C’est la remarque idiote la plus entendue par un végé au cours de sa vie: « et le cri de la carotte, t’y as pensé? les salades aussi souffrent quand on les arrache! » »
L’insolente Veggie

Mon ami Mathieu m’a récemment envoyé un article de la BBC où l’on expliquait que les plantes pouvaient se souvenir et réagir à de l’information contenue dans la lumière grâce à des signaux électro-chimiques qui rappellent notre système nerveux . Après la lecture de cet article, Mathieu s’est posé la même question que de nombreux végétariens « Si elles ont un système nerveux et qu’elles pensent, est-ce qu’elles ressentent la douleur? Et si oui, on mange quoi maintenant? ».

Le conséquentialisme et la souffrance inutile

Après l’éthique de la vertu et la cruauté, puis le déontologisme et le droit des animaux, je conclus cette série sur l’éthique animale avec le conséquentialisme. Des trois théories morales de bases, c’est sans doute celle-ci qui correspond le plus à l’esprit de ce blog.

Le chien de Malebranche et les couilles de Descartes

On raconte que, battant son chien, le philosophe Nicolas Malebranche aurait affirmé : « Ça crie mais ça ne sent pas ». Autrement dit, inutile de s’apitoyer : le chien ne souffrait pas. Mais quelle mouche avait donc piqué notre philosophe? Malebranche n’est peut-être pas un philosophe très connu (c’est un métaphysicien et théologien français du 17e siècle), mais il n’est évidemment pas connu pour avoir été particulièrement cruel – ou particulièrement con. Alors pourquoi cette affirmation incongrue?

La revue de l’année en nutrition du Dr Michael Greger

Si on cherche « what to eat » sur Google, on aura 184 000 000 résultats. Des centaines de livres nous disent quoi manger et l’année dernière, 5000 études relatives à la nutrition ont été publiées à travers le monde. On a d’ailleurs l’impression qu’elles se contredisent toutes. Comment s’y retrouver ? Il est difficile de croire que quelqu’un puisse lire toutes ces études, les analyser et surtout, les comparer pour se faire une idée claire de ce qu’il faut manger et ce qu’il faut éviter. Pour notre plus grand plaisir et surtout, notre santé, cette personne existe. C’est le Dr Michael Greger, un brillant boulimique de l’information doublé d’un vulgarisateur hors pair. Le Dr Greger propose à chaque année un DVD, « Latest in Clinical Nutrition » qui synthétise les découvertes des derniers mois. Il est aussi invité comme conférencier aux quatre coins de l’Amérique. Grâce à l’Association végétarienne de Montréal, le Dr Greger était à Montréal hier.

Le sucre et les aliments transformés

La semaine dernière, Cerveau et Psycho reprenait une étude faite sur des rats qui cherchait à savoir si un régime de type fast food modifiait l’expérience du plaisir.  L’équipe de chercheurs a constaté que le fast food provoquait une désensibilisation des circuits du plaisir, obligeant le mangeur à augmenter ses doses pour se sentir satisfait. L’étude rapporte aussi une diminution d’un type de récepteurs de la dopamine, la molécule du plaisir. Ces modifications sont les mêmes que celles produites par la cocaïne et l’héroïne. Dans les faits, ce n’est évidemment pas le fast food en soi qui crée la dépendance, mais bien le sucre qu’il contient, une conclusion à laquelle était aussi arrivée une équipe de chercheurs de Princeton il y a deux ans. On a  là toute l’essence de ce qu’on appelle la nourriture transformée : fournir du sucre, le carburant préféré du cerveau, plus rapidement et efficacement.

Les effets du gaspillage alimentaire

S’il y a un principe moral relatif à l’alimentation qui fait unanimité, c’est bien celui-ci: le gaspillage, c’est mal. Nos mamans nous disaient de finir nos assiettes et c’est toujours avec un peu de honte qu’on balance au panier une salade oubliée qui macère dans le fond du frigo. On trouvera toujours des personnes pour justifier la consommation de viande ou l’achat d’aliments importés, mais rares sont celles qui vont se vanter de jeter de la nourriture.

Pourtant, la question des effets du gaspillage alimentaire a été assez peu analysée et étudiée. Ce n’est qu’au cours des dernières années qu’on a publié les premières études sérieuses sur le sujet, avec des chiffres qui ont de quoi réveiller les brocolis fanés : dans les pays riches comme les États-Unis, l’Angleterre et le Canada, 50% des aliments produits seraient gaspillés. De tous les aliments offerts au détail, 38% seront perdus (c’est l’équivalent de 183 kilogrammes par personne par année). La moitié au niveau de la transformation et à l’épicerie ou au restaurant, l’autre moitié à la maison. Et il faut ajouter les pertes dans les champs pour atteindre le 50%.

La méthode douce pour inspirer la bonne décision… appliquée à l’alimentation

J’ai depuis longtemps l’intuition que si on nous proposait par défaut un repas végétarien dans l’avion ou dans les banquets, rares seraient ceux qui feraient l’effort de commander un repas carné. On aurait ainsi, comme société, les bénéfices d’une réduction de consommation de viande sans pour autant brimer la liberté de choix. Je viens de tomber sur des données qui me donnent raison. Et j’aime bien avoir raison, encore plus sur des questions relatives au raisonnement !

Le déontologisme et les droits des animaux

Entre deux chapitres de ma thèse en philo – qui n’a rien à voir avec l’éthique animale – j‘essaie de faire mon intéressant sur ce blog. Après un apéritif sur le sophisme naturaliste et une entrée sur la première des trois théories morales, l’éthique de la vertu, j’attaque aujourd’hui le plat de résistance avec la seconde, le déontologisme. Désolé, si ce billet est un peu long mais je crois qu’il reste plus digeste que les 3h de cours que j’inflige régulièrement sur le même sujet à mes étudiants de l’Université de Montréal. Je garde la troisième approche, le conséquentialisme pour le dessert (c’est la théorie de Peter Singer, le chouchou d’Élise).

Le cochon et le tire-bouchon

Quelle est la différence entre un cochon et un tire-bouchon? Aucune : ce sont tous les deux des choses. Et qu’est-ce qu’une chose? C’est ce dont on peut user et abuser à loisir, ce qu’on peut utiliser comme un moyen. Par exemple, pour ouvrir une bouteille de rouge. Or, un moyen n’est jamais respectable en lui-même (en revanche, la fin qu’il sert l’est parfois). C’est pourquoi les choses ne méritent pas d’être respectées, elles n’ont pas de dignité morale ; et c’est pourquoi elles n’ont aucun droit.  Ça ne veut pas dire qu’on peut faire n’importe quoi avec les choses : je n’ai pas le droit de voler un tire-bouchon ou de le planter dans la tête d’un cochon ; mais c’est parce que je bafoue alors les droits du propriétaire du tire-bouchon ou du cochon.

Collaboration spéciale d’un lecteur qui souhaite poursuivre les réflexions sur l’éthique de l’alimentation.
Dans cet article, je suggère que manger de façon éthique implique non seulement l’éthique animale et environnementale, mais aussi la lutte contre la famine.

Manger et liberté

Même si je te propose des arguments santé béton, tu as le droit de manger de la malbouffe ou des aliments transformés – personne ne peut t’en empêcher. Même si je te prépare un succulent repas santé et gastronomique, il se peut qu’il ne te plaise pas au goût. Autrement dit, ta santé ne concerne a priori que toi, et puis les goûts, ça ne se discute pas. Je peux bien sûr t’expliquer que c’est dans ton intérêt de bien manger (si tu veux vivre plus longtemps et moins malade), demeure que tu as toujours le choix de ce que tu mets dans ta bouche.

Les origines des règles de bonne conduite à table

Les règles nous disent comment nous comporter. Ce qui est permis, ce qui est interdit. Dès l’invention de l’imprimerie, on a commencé à publier des manuels de savoir-vivre. Dans ces manuels dictant les normes à suivre en société, les règles de bonne conduite à table occupaient une place prépondérante. Nombre de ces règles encadrent toujours nos repas, d’autres sont apparues au fil des siècles pour constituer ce qu’on appelle maintenant l’étiquette. D’où viennent-elles ? Pourquoi les avons-nous ? Comment se sont-elles imposées à nous ?