Qu’est-ce qu’un flexitarien ?
Après les omnivores, les crudivores, les localovores, les végétariens et les végétaliens, une nouvelle classe de mangeurs a fait son apparition : les flexitariens. Être flexitarien, en gros, c’est être végétarien à temps partiel. Ou mieux, être végétarien en se permettant de sauter la clôture de temps en temps. On parle aussi de semi-végétariens. Dans The Ethics of What We Eat Peter Singer parle de l’exception parisienne, en racontant qu’une amie végétarienne se permet de manger de la viande lorsqu’elle visite la France. Dans Food Matters, Mark Bittman, chroniqueur au New York Times et critique gastronomique, se décrit comme un part-time vegan : Il est complètement végétalien jusqu’à 17h et se permet de manger ce qu’il veut pour souper.
La définition du flexitarisme n’est pas très claire, mais je doute qu’un carnivore qui mange un plat de pâtes sauce tomate quand il ne reste plus rien puisse se considérer comme un flexitatrien. On peut penser qu’est flexitarien quelqu’un qui diminue volontairement sa consommation de viande sans l’éliminer complètement. Disons que le niveau d’entrée, ce serait suivre le Meatless Monday, ce mouvement né il y a quelques années mais qui prend de plus en plus d’ampleur et qui vise à encourager une réduction de la consommation de viande. Des écoles, des hôpitaux et même des villes suivent le mouvement. Les purs et durs traitent les flexitariens de traitres. Les plus modérés se disent que c’est quand même mieux que rien, et un pas dans la bonne direction. Martin parlerait ici de classique débat entre déontologisme et conséquentialisme.
En fait, on peut regrouper les arguments en faveur d’une réduction de la consommation de viande en trois catégories : pour des questions de santé, pour l’environnement et pour empêcher la souffrance des animaux. Les deux premiers arguments sont plutôt rationnels, le dernier plus émotif. Et c’est justement lorsqu’on pose la question de la souffrance animale que le flexitarisme devient plus difficile à justifier – faire souffrir un peu, est-ce vraiment moins pire que faire souffrir beaucoup ? La question de la souffrance engendre des réponses d’ordre émotif (dégoût, compassion), qui ne sont pas là lorsqu’on parle de santé ou d’environnement, et c’est sans doute pour cette raison que de nombreux vegans peuvent s’abstenir de tout produit animal. On entend «quand je vois un morceau de poulet, je vois un animal mort, ça me coupe l’appétit» mais beaucoup moins souvent «lorsque je vois une tranche de bœuf, je pense à l’impact de sa production sur le réchauffement climatique et j’ai envie de vomir». J’ai tendance à penser que les flexitariens adoptent une diète semi-végétarienne d’abord pour des raisons rationnelles – comme celles qui nous amènent à acheter une voiture hybride – alors qu’il est plus naturel de refuser toute consommation de produits d’origine animale pour ceux qui font ce choix pour des raisons émotives.
Reste que les arguments en faveur d’une diète flexitarienne sont nombreux : on obtient les bénéfices physique d’un régime végétarien sans avoir à en suivre les règles strictes, on réduit largement sa contribution aux émissions de GES, on peut même s’éloigner de la production industrialisée de viande pour se tourner vers de la viande bio. Et les flexitariens qui consomment des produits végés encouragent les épiceries à garnir leurs tablettes d’alternatives aux produits animaux et les restaurants à offrir de véritables plats sans viande, au plus grand bonheur des végétariens purs à 100% (qui ne compteraient que pour de 3% de la population). En sortant le végétarisme de la cour des granos du Plateau et en offrant du lait d’amande au Provigo de Trois-Rivières, on permet à chacun de choisir un régime qui se rapproche de ses besoins et ses valeurs et on contribue aussi à réduire la souffrance animale.
Ajout : J’ai aidé un flexitarien à faire l’épicerie !
Ressoures complémentaires :
Part-Time vegetarian, Newsweek, 29 septembre 2008
The rise of the non-veggie vegetarian, BBC, 5 novembre 2009
La popularité de «flexitarian» et de«vegetarian» sur Google Trends